Je n'ai pas l'habitude de me décrire. Du moins, je suis assez mystérieux sur mon caractère, cependant, peut-être puis-je faire un effort ?
Commençons par le plus simple : le physique. Comme vous pouvez le constater, je suis assez grand, brun, les cheveux mi-longs, et un regard sombre. Ma peau est tannée, bien que je passe énormément de temps dans mon atelier, sous la terre. Ce sont essentiellement mes balades dans les bois, pour récupérer des plantes, qui permettent à ma peau de brunir et à mes muscles de s'entretenir. Oui, j'ai de la chance, je suis plutôt bien bâti, et partout, si vous voyez ce que je veux dire. Mes muscles me sont utiles pour protéger ma familles, car nous allons y venir, je suis très protecteur, surtout pour mes enfants. Quoi qu'il en soit, je dissimule ce physique sous d'épais manteaux, tuniques, aujourd'hui nécessaires à Arendelle.
D'un point de vue caractériel, je suis une personne très taciturne et assez misanthrope. Utilisant l'agressivité comme carapace, je suis froid, voire hautain, mais j'ai un sens de la franchise très marqué. Je me bats pour ce qui compte réellement pour moi. Je suis prêt à supporter le poids de la culpabilité pour une cause qui me tient à coeur. J'ai également appris à me fermer aux autres, et à assumer tout seul le fardeau de la souffrance de mon coeur brisé.
Et bien voilà, vous savez tout, j'espère que vous êtes satisfaits.
D ’où vient tu , que t'est t'il arrivée ?
Minimum 45 Lignes. Par delà les montagnes, au coeur de la terre, dans les tréfonds de la civilisation, sous d'épais nuages, se déploie l'ombre de l'enfant.
Le ciel semblait bas, les nuages chargés de pluie. L'atmosphère était sombre, le soleil ayant déserté ce hameau de verdure. Penché au dessus du petit tas de pierre, le garçonnet de dix ans se recueillait en silence. Son regard était empli de tristesse, même si cela faisait plus de huit ans, la blessure demeurait ouverte. Comme chaque fois, Arean retenait ses larmes. Perdre son père avait de quoi traumatiser n'importe quel enfant, et Ren n'échappait à la règle. D'autant plus qu'il l'avait vu s'éteindre à petit feu devant ses yeux, grignoté par cette maladie pernicieuse, face à laquelle, la famille Ilyès paraissait impuissante. Encore enfant, le jeune garçon n'avait pas immédiatement compris ce que la mort signifiait, ni ce qu'elle engendrait, toutefois, en grandissant, tout le poids de celle-ci s'était affaissé sur ses frêles épaules, qui ne tardèrent pas à succomber. Et la tristesse l'avait envahi, devenant rapidement une seconde peau. Le mutisme comme forme d'expression, le regard aussi sombre que le charbon, Arean avait du apprendre à continuer à avancer. Sans un père pour le guider, sans cette figure rassurante qui lorsque l'avenir semble trop obscur est là pour prendre la main. Non, le garçonnet s'était forgé tout seul, et il s'interdisait de l'oublier. Cela lui donnait sans doute une raison de plus de venir dans ce lieu morbide, pour bien se rappeler qui il était. Arean Téodric Ilyès. Orphelin de père, fils d'une femme qui s'était remariée sans même penser à ce qu'il pouvait ressentir, lui. Il avait de soit que l'enfant détestait son beau-père, toutefois, sa seule récompense était sa demi-soeur, ce petit joyau d'innocence déposé sur son chemin.
Respirant une dernier fois l'air humide de la clairière, Arean tourna les talons sans même donner un dernier coup d'oeil au lieu qui l'entourait. Il s'était déjà laissé imprégner de l'atmosphère et cela lui suffisait. Rester plus longtemps serait trop douloureux. Une souffrance parfaitement inutile à s'infliger, son coeur saignant déjà. Mais bien évidemment, le jeune Ilyès dissimulait tout ces sentiments sombres, adoptant une allure forte. La mort de son père était son fardeau, et il ne voyait pas l'intérêt de le faire partager à d'autres personnes. Parfois, lorsqu'il allait trop mal, il se contentait de venir passer la nuit dans ce trou de nature, dormant sur les restes du défunt homme, se privant de nourriture jusqu'au lendemain. Mais une fois de plus, il ne pipait mot. Quelle importance ?
D'un pas traînant, il quitta le col, traversa la montagne pour couper à travers le bois, afin de rejoindre ses amis, ou du moins ses voisins, qui étaient étendus dans un pré isolé.
A peine avait-il franchi la lisière des bois, que déjà le jeune Bard s'avança vers lui :
" Ren, qu'est-ce que tu faisais, cela fait une heure que l'on t'attend ! "En guise de réponse, Arean se contenta de hausser les épaules, et tous se turent, tandis que Bard regagna sa place initiale. Le blondinet était la seule personne qu'Arean considérait réellement comme amie. Il éprouvait une véritable confiance pour Bard, bien qu'il ne lui montrait guère. A vrai dire, Ren ne montrait rien à personne. Il était comme un bloc de glace. Un bloc de glace qui souriait de temps à autre.
Ses camarades lui ayant fait une place, il s'assit à leur coté, fermant le cercle parfaitement établi. Au centre, trônait un grand sachet de jute et plusieurs pipes encore vides. Le jeune Ilyès interrogea ses compagnons du regard, bien qu'il comprit ce qui se trouvait devant lui :
" Je l'ai piqué chez mon vieux, de l'herbe des montagnes, c'est la meilleur. " Arean ne répondit dit pas, et se remplit un pipe sous le regard désespéré de Bard. La personnalité de l'orphelin de père le dépassait pourtant, il nourrissait envers celui-ci une profonde admiration. Il aurait voulu lui ressembler, détenir cette éloquence, ce ton laconique et parvenir à être aussi détaché de la réalité. Seulement, il ne mesurait pas l'ampleur de la souffrance qui grandissait dans l'âme de son ami. Il ignorait que cette façade de dominant ne servait qu'à dissimuler ses faiblesses. Des faiblesses qui devenaient alors des forces.
Portant le bec à sa bouche, Arean se laissa envahir par les relents de cette fumée qui emplissait ses poumons. Il sentait ses pores se dilater, son esprit se détachant lentement de son corps. Et en quelques minutes, il finit par errer entre songe et réalité. Les nuages dans le ciel gris paraissaient si proches qu'on aurait pu les toucher, la brise, qui s'était à nouveau levée, était comme une caresse sur sa peau. Tout ses membres s'engourdissaient et les voix de ses camarades ressemblaient à un murmure, à un bourdonnement. Il les entendait sans les écouter. Il voguait ailleurs, loin de sa réalité si pesante.
Le temps s'étirait, le soleil peu présent déclinait déjà, quand Arean recouvra ses esprits. Les rires de ses amis lui parvinrent, il émergea doucement.
" Je serais maître d'armes. Je me vois déjà, l'épée à la main, bottant le cul à tout ces enfoirés qui nous rejettent aujourd'hui.
- Calme toi Bard, répliqua Ulrick. On finira comme des merdes, tu le sais déjà. Tu es le fils d'une putain, mon père est un bandit, Peter et sa famille vivent quasiment dans la rue. Et Ren, et bien... Bref, au cas où vous ne l'aurez pas compris, on est des renégats. Des parias, les fonds de cales des bateaux. On n'a aucun avenir car nous n'avons pas de passé. Des enfants perdus.. "
Le silence s'imposa lorsque la voix suave et grave d'Ulrick s'éteignit. Son pessimisme, qui s'accordait avec la froideur du paysage, avait gagné le coeur de tout les garçons. Bard, le plus gai de tous se redressa et esquiva un sourire. Il n'était pas totalement d'accord, lui avait l'espoir. Il fallait toujours avoir de l'espoir, sinon le monde vous détruit. Il vous ronge, il vous enfonce plus au fond encore du trou que vous vous êtes vous même construit.
Rejetant l'une de ses mèches blondes, il agita la tête :
" Je pense que tu as tord. On peut toujours choisir notre destinée, qu'importe ce qu'il y a eu avant nous... Ce qui compte c'est ce que l'on veut être. Tu n'es pas d'accord Ren ? "
Il espérait trouver du soutient auprès de son ami. Il savait qu'Arean était du genre à aller de l'avant, après tout, si tel n'avait pas été, comment aurait-il pu survivre après avoir réalisé le départ de son père ?
Le regard du jeune Ilyès se perdit dans les trainées nuageuses, à travers desquelles volaient plusieurs oiseaux. Il aurait voulu aller au sommet des montagnes, toucher le ciel, s'élancer dans le vide. Un rictus fendit son visage, tandis qu'il pouffa :
" On est des gosses... Des foutus gosses... "
Il se leva alors, les saluant du regard et quitta le pré, qui peu à peu, se laissait envelopper par l'obscurité. Derrière ses airs de je m'en-foutiste, son esprit travaillait. Ils n'avaient pas tord. Quel avenir pour lui ?
Au détour d'une ruelle, à travers les gouttes de pluie, le silhouette de l'enfant pénètre dans la chaumière.
Le visage rachitique et sévère de son beau-père scrutait Arean d'un oeil mauvais. Il l'observait toujours avec méchanceté, lui lançant des pics pour bien montrer son rejet de l'enfant. Mais il fallait dire que Ren lui rendait la pareille. Le garçon n'avait jamais accepté que sa mère remplace son père par cet étranger, et il prenait grand soin à marquer sa distance avec cette famille qu'il niait. La seule personne qui comptait à ses yeux était sa demi-soeur, de cinq ans plus jeune que lui, bien que ne lui montrait pas.
" A table ! cria la mère de famille. "
La pauvre femme était usée, et dépitée de voir l'attitude de son fils. Il ne lui parlait pas, jamais, et elle ne parvenait plus à supporter ce mutisme dans lequel Arean se réfugiait. Il lui rappelait tellement son père, cet homme qu'elle avait aimé et qui lui avait été enlevé trop tôt.
" A table mon chéri, fit-elle en s'adressant au garçon qui jouait avec sa soeur. "
Sans aucune réponse ni le moindre regard pour celle qui l'avait enfanté, Arean se leva et s'assit à la table.
Loin sont les lueurs des montagnes, les maquis et les prés... Dur est le passage de l'enfance à l'âge de raison.
Le goût amer des souvenirs se répand dans le palet du jeune homme, proche de la fin d'une existence.
Comme un fantôme au creux de la nuit, l'homme enterre ses secrets.
L'odeur de l'humus, les nuages figés dans le temps, le pré est tel qu'il a toujours été.